Adjugé 462 834 € avec frais | RARE LUSTRE À HUIT BRAS DE LUMIÈRE ATTRIBUÉ À ANDRÉ-CHARLES BOULLE (1642-1732), CLASSE MONUMENT HISTORIQUE

L’anneau de suspente est orné d’une corolle de feuillage. La boule de suspente est ornée de quatre feuillages à crosses et quatre boutons de fleurs. Le fût forme un vase richement décoré au centre de quatre consoles à buste d’espagnolettes souriantes et coiffées d’une aigrette. Les huit bras de lumière en console sont à riche décor de feuillage, petites coquilles, boutons de fleurs et coquille stylisée. Les binets sont en feuillage découpé, reposant sur un bouton côtelé et les bobèches sont en corolle d’une frise de feuilles d’eau. La coupe circulaire d’où s’échappe le bras, est à simple moulure avec cartouches feuillages et quatre gaines de feuillage au naturel ; le bouton du bas est à frise de feuilles.

Provenance : Ancienne Collection du château de la Roche-Guyon : Ce lustre ornait le grand salon du château de 120 m 2 et dominait un mobilier et des tapisseries de très grandes valeurs du château du duc de la Roche-Guyon : François VIII de la Rochefoucauld (Paris 1663-1728), premier duc de la Roche-Guyon en 1679, quatrième duc de la Rochefoucauld en 1680, maréchal de camp le 3 janvier 1696, Grand Maître de la garde-robe du roi (1679 à 1718).

François VIII de la Rochefoucauld épousa en 1679 Magdeleine-Charlotte Le Tellier (1665-1735), fille du marquis de Louvois (1639-1691), ministre de Louis XIV et Surintendant des Bâtiments, Arts et Manufactures de France (de 1683 à 1691). Le ménage demeurait le plus souvent dans l’appartement de l’ancien Hôtel de la Surintendance des Bâtiments du Roi à Versailles et se rendait régulièrement à la Roche-Guyon. André-Charles Boulle fut attaché à la Manufacture des Gobelins et fut nommé premier ébéniste de la Maison du roi par titre et brevet. Louvois connaît l’ébéniste du roi et apprécie l’excellence de son travail. Il doit intervenir pourtant lors de nombreux litiges opposant le protégé du roi à ses « clients » lesquels s’acquittaient souvent par avance de travaux qui n’étaient pas livrés à temps.

Par deux fois en 1685, le ministre de Louis XIV se rend dans l’atelier de la galerie du Louvre pour constater, malgré un très grand nombre d’ouvriers, l’impossibilité pour l’ébéniste d’honorer ses commandes. Louvois tente même de faire patienter le grand Dauphin concernant le fameux cabinet qui sera le chef-d’œuvre de Boulle.

Les deux hommes se connaissent. Il est donc plausible voire certain que ce superbe lustre en bronze soit sorti de l’atelier de André-Charles Boulle. Il faut convenir que la qualité de la ciselure et le dessin général est indéniablement de la main du maître et ressemble en tous points au lustre que possède le Louvre. L’incendie des ateliers de Boulle le 19 août 1720, n’empêcha pas le ciseleur émérite pourtant âgé de 78 ans de restaurer son établissement avec une ardeur et une verdeur qui l’accompagnèrent jusqu’à sa mort à 89 ans à Paris le 29 février 1732.

C’est donc par l’entremise de son beau-père que le duc de la Roche-Guyon a obtenu ce chef-d’œuvre commandé avant l’incendie de l’atelier survenu en 1720. Ce lustre aurait été livré plus tard en 1732.

Nous savons que des aménagements et des remises en état du château, y compris de nombreux ajouts ont été réalisés en 1740. Bien que ce lustre ne fut plus à la mode sous Louis XV, son origine, son historique et sa beauté l’ont sauvé.

Le XIX e siècle sera fatal pour cette vaste demeure dont le donjon fut pourtant classé en 1862. Une gravure de Adolphe Maugendre (1809-1895) représente le grand salon avec notre lustre ainsi que quelques beaux meubles, en 1840. Puis en 1930, première dispersion partielle du mobilier qui était en place depuis le début du XVIII e siècle malgré la Révolution. Moïse de Camondo sera un des acheteurs. Le château fut occupé pendant la seconde guerre mondiale par l’armée allemande jusqu’en août 1944. Un an avant, en pleine guerre, le château bénéficiera d’un deuxième classement M.H. par arrêté du 6 janvier 1943. Une partie du mobilier (huit pièces parmi des objets d’exception) sera classé au titre des monuments, dont ce lustre. Celui-ci restera depuis son achat au début du XVIII e siècle, dans le grand salon (N° de classement 1945/04/10 : classé au titre d’objet). Sur une carte postale de 1910, le lustre parait bien minuscule dans cette vaste pièce. Une photo tirée de l’ouvrage « Les anciens châteaux de France », 1924, pl. 11 montre également les quelques fameux meubles qui seront vendus ainsi que notre lustre. C’est en 1987 que sera mis en vente l’ensemble des Collections du château de la Roche-Guyon les 6,7, 8 et 9 décembre. dans le cadre de la Succession du comte Gilbert de La Rochefoucauld, duc de La Rochefoucauld (1889-1964) et de Marie-Louise Lerche, duchesse de La Roche-Guyon (1899-1984), sa seconde épouse et veuve. La presse précisait : «... L’intégralité de ses Collections de l’Ancien régime...». Les 239 lots de la vente trouveront preneur. Seuls huit meubles ou objets classés monuments historiques ne pourront quitter le territoire national, dont notre lustre.



ATTRIBUÉ À ANDRÉ-CHARLES BOULLE (1642-1732)
RARE LUSTRE À HUIT BRAS DE LUMIÈRE PARIS, VERS 1720
Époque Régence Bronze ciselé et doré
H. 98 cm Ø. 98 cm
Classé monument historique le 10 avril 1945.
Adjugé 462 834 € avec frais